La sylvothérapie est une thérapie naturelle et douce
Elle est née au Japon au début des années 80, suite aux dégâts humains des trente glorieuses dans ce pays spécifiquement : burn-out, suicides, dépressions... Le Ministère de la Santé lui-même a mis en place un vaste programme de santé national, dans lequel ont été conçus et développés les shinrin-yoku, littérairement "bains de forêt" [i].
Le concept est simple : créer les conditions d'une immersion en forêt orientée ressourcement et reconnexion à soi, accessible à tous.
Pourquoi en forêt ?
La nature nous offre de nombreux bienfaits physiologiques et psychologiques. La nature sous toutes ses formes, que ce soit la montagne, la campagne, la mer, les déserts, la jungle... et les forêts de nos latitudes. Chaque écosystème nous offre ses spécificités. La forêt est un écosystème particulièrement généreux en bénéfices thérapeutiques, et la sylvothérapie va consister à proposer des pratiques qui permettent de maximiser ces bienfaits, par rapport à une sortie classique en forêt.
Un espace de ressourcement accessible facilement
Il se trouve que la forêt tempérée présente de nombreux avantages et très peu d'inconvénients.
Elle reste facile d'accès. Comme elle n'est malheureusement plus primaire, mais totalement domestiquée, elle est quasiment dépourvue de prédateurs hostiles et de plantes toxiques (à part quelques espèces).
C'est le contraire des espaces totalement sauvages, c’est-à-dire ce qu’en anglais on nomme la "wilderness". Ce type de grands espaces nous offre un environnement de pratique idéal pour les quêtes de vision ou les stages de survie en milieu ostensiblement hostile. Dans ces lieux sauvages, l'expérience est plus intense, et donc plus exigeante. Il ne s'agit plus d'une thérapie douce. Peu de personnes sont prêtes à vivre de telles expériences.
Un espace intermédiaire
C'est un espace liminal, une zone d'interface entre le monde cadencé, devenu irrationnellement sur-rationnel, et la "wilderness".
Les Japonais l'appellent la zone de "satoyama" ("sato", la ville, et "yama", la montagne)[ii].
Que se passe-t-il dans un bain de forêt ?
Entre ces deux seuils, les participants à un bain de forêt vont vivre ce qui s’appelle des invitations. Ces invitations ont pour intention de les raviver (au sens de remettre de la vie en eux) par le réveil de leurs sens.
A la sortie, lorsqu’ils passent le seuil d’incorporation et retournent dans le monde cadencé, leur attention s’est rééquilibrée sur le centre instinctif (le corps) et le centre émotionnel.
C’est sans doute le principal bienfait qu’apporte la sylvothérapie par rapport à une sortie classique en forêt.
Les invitations
)Elles permettent de réveiller l’être par le réveil des sens. Elles sont à la base de ce travail. Il s’agit ni plus ni moins que de pleine conscience en forêt, une pleine conscience non pas focalisée sur l’intérieur, mais sur l’extérieur, puis sur l’intérieur. La question est en deux temps :
Un cadre au service du processus
C’est le cadre construit par le guide et plus généralement par la pratique même du bain de forêt, qui va permettre à la fois de suivre les invitations et de lâcher le mental, et de partager ensuite en cercle de « parole », en groupe, pour ancrer les prises de conscience par l’expression (orale ou posturale, verbale ou non verbale.
Le guide, par sa manière d’amener les consignes des invitations, par son savoir-être, par son énergie, crée les conditions de la confiance pour que ces partages soient profonds, authentiques, et en sécurité.
Cette sécurité vient du fait que le guide est le gardien du cadre, et garantit en cela que les autres participants accueilleront les expressions de chacun dans le non-jugement et le respect.
Il arrive même souvent que les partages soient accueillis avec émotion, car les émotions rentrent en résonance. Les prises de consciences des uns, une fois verbalisées, se transmettent pour certains autres. Les partages des uns sont des cadeaux pour les autres, et les participants expriment en clôture finalement beaucoup de gratitude, pour la forêt, pour eux-mêmes, pour le guide, mais aussi pour leurs camarades du moment, car il se sera vécu de très beaux partages. Et ce, que ces camarades du moment soient des participants qu’ils ne connaissaient pas au début de la session autant que des collègues de la même équipe depuis plusieurs années [v].
A la fois facilitateur et passeur
Par le cadre qu’il construit et par la qualité d’écoute qu’il institue, le guide est dans une posture de facilitateur [vi]. Plus précisément il est co-facilitateur, aux côtés d’une partenaire de choix, la forêt. Ensemble, Ils créent les conditions d’émergence, en toute sécurité et avec profondeur, de la transformation sur le plan individuel voire, dans le cas d’accompagnement d’équipes déjà constituées, sur le plan collectif.
Cela va même un cran plus loin. Le guide n’est pas le thérapeute. Le thérapeute est la forêt et le guide ouvre les portes [vii]. Le guide agit donc aussi comme un passeur pour que le participant et la forêt vivent la relation qu’ils ont à vivre et que cette relation soit thérapeutique. La relation est thérapeutique dans un sens comme dans l’autre, car, après avoir vécu un tel niveau de connexion, le participant reviendra dans le monde cadencé avec une plus grande conscience du soin qu’il faut accorder aux forêts du monde entier.
Comme le disait Jacques Cousteau :
On ne protège que ce que l’on connait.
Par Serge Mang-Joubert
- Guide en sylvothérapie / facilitateur en forêt
Crédit Photo : Vous & Nous Studio
Bibliographie / webographie :
i - Dr Qing Li, Shinrin-yoku, l’Art et la Science du bain de forêt
ii - ANFT (Association of Nature and Forest Therapy) – www.natureandforesttherapy.org
iii - Marshall Rosenberg, Les mots sont des fenêtres, ou bien ce sont des murs
iv - Source : synthèse des questionnaires de satisfaction distribués à chaque participant de chaque bain de forêt standard ou prolongé d’Entre les Arbres
v - Source : synthèse des questionnaires de satisfaction distribués à chaque participant de chaque bain de forêt standard ou prolongé d’Entre les Arbres
vi - Formations de facilitateur du changement, www.changementvivant.com
vii - ANFT (Association of Nature and Forest Therapy) – www.natureandforesttherapy.org
Voir la page de Serge Mang-Joubert
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